[parfois écrit à tort Zhao Qi 趙祺]

Originaire de Yexian 掖縣, dans l’actuelle agglomération de Laizhou 萊州 (ou de Yixian 嶧縣, au sud-est de la province, selon certaines sources erronées), Zhao Qi est issu d’une vieille famille de la région qui compte parmi ses ancêtres Zhao Shizhe 趙士哲 (1593-1655), célèbre lettré de la fin des Ming. Sa formation fait toutefois de lui un pur produit de la présence allemande dans la péninsule entre 1898 et 1914. Les sources se contredisent quant à l’institution dans laquelle il apprend la langue de Goethe. Plutôt que la Deutsch-Chinesische Hochschule (De-Hua daxue 德華大學) qui ne voit le jour qu’en 1909, il est plus probable qu’il ait suivi des cours à l’École supérieure germano-chinoise (De-Hua shuyuan 德華書院) fondée en 1898 pour doter le territoire à bail d’une élite indigène germanophone. Si Zhao intègre la police locale comme interprète une fois diplômé, ses compétences linguistiques se retournent en quelque sorte contre l’Allemagne par la suite. Au lendemain de la chute des Qing, il mène en effet une action en justice de longue haleine contre la Banque germano-chinoise (De-Hua yinhang 德華銀行) de Jinan. En août 1912, celle-ci refuse de restituer les sommes déposées par plusieurs dizaines de clients chinois, parmi lesquels Zhao, au prétexte qu’un certain Jin Xiangsun 金薌蓀, comprador ayant joué un rôle dans ces dépôts, a pris la fuite. Confiant dans l’État de droit allemand, Zhao porte l’affaire jusqu’à la Cour de justice de Berlin, où il obtient réparation (avec intérêts) au bout de trois ans de procédure. Les nombreuses pièces du dossier, dont un certain nombre traduites depuis l’allemand par ses soins, sont publiées sous forme d’ouvrage en 1917 sous le titre Hua-Yang zhaiwu susong cankaoshu 華洋債務訴訟參考書 (Documents relatifs au litige pour le recouvrement de dettes entre la Chine et l’Occident). Durant son séjour en Allemagne, il suit des cours en auditeur libre. De retour en Chine en 1914, Zhao travaille pour le Bureau des travaux de la ligne de chemins de fer Tianjin-Pukou (Jin-Pu tielu gongchengju 津浦鐵路), avant d’occuper des charges publiques comme celle d’inspecteur général du Bureau de la police de Wusong-Shanghai (Song-Hu jingchating duchazhang 淞滬警察廳督察長) que vient de créer le Gouvernement Beiyang à Wusong. En 1916, il sert comme conseiller diplomatique de haut-rang (gaodeng waijiao guwen 高等外交顧問), à ce même échelon local. L’année suivante, Zhao Qi est nommé directeur général de l’Entreprise de construction du Port commercial de Longkou (Longkou shangbu xingzhu gongsi zongli 龍口商埠興築公司總理), avant d’être promu administrateur du port (Longkou shangbu zongban 龍口商埠總辦) en février 1921. En avril 1922, il intègre l’administration provinciale du Shandong comme conseiller (canyi 參議).

La carrière de Zhao Qi connaît une accélération spectaculaire en juillet 1925, lorsqu’il accède au poste particulièrement convoité d’administrateur général du port commercial de Jiao’ao (Jiao’ao shangbu 膠澳商埠), devenant ainsi la principale autorité civile de Qingdao, sous le nom de “gouverneur” ou de “maire” dans les sources anglophones. Il doit cette nomination à l’appui du seigneur de la guerre Zhang Zongchang 張宗昌 (1881-1932), dit “le général viande de chien” (gourou jiangjun 狗肉將軍), puissant allié de Zhang Zuolin dans la région et “pays” de Zhao. Ce dernier arrive littéralement dans les fourgons du nouvel homme fort du Shandong, qui fait une entrée remarquée à Qingdao dans son train blindé. Outre sa garde rapprochée d’un millier d’hommes, Zhang Zongchang est accompagné de 700 “clients” qui trouvent à se placer dans la nouvelle administration sous les ordres de Zhao. Depuis la Conférence de Washington à l’issue de laquelle le Japon a restitué à la Chine l’ancienne concession allemande le 4 février 1922, quatre hommes se sont déjà succédé à ce poste, au gré des revers de fortune des seigneurs de la guerre les patronnant. La prise de fonction de Zhao est donc suivie avec attention par la communauté étrangère, qui s’interroge sur la capacité de la Chine à administrer efficacement l’une de ses principales portes d’entrée au Nord de Shanghai. Jusque-là du ressort des autorités centrales de Pékin, la gestion de Qingdao passe alors dans le giron du gouvernement provincial du Shandong. Le nouveau maire est décrit en termes favorables : “Mayor Chao presents pleasing appearance, is very approachable, speaks German fluently, grasps things quickly and speaks directly to the point. If given fair chance, Chao Chi will undoubtedly prove himself capable of rendering efficient service” (The China Weekly Review, 01/11/1925). Cette bonne impression est renforcée par le choix des nouvelles autorités de créer un Conseil des finances dont quatre des neufs membres sont étrangers. Par la suite, Zhao Qi est félicité pour la transparence de son administration qui est l’une des seules en Chine à publier un bilan mensuel de ses revenus et dépenses. Le gouvernement de Zhao Qi est d’autant plus apprécié des milieux d’affaires, qu’il réprime sans ménagement toute revendication sociale. C’est notamment le cas du Club des travailleurs du Bureau des cours d’eau du port commercial de Jiao’ao (Jiao’ao shangbu gongren julebu 膠澳商埠水道局工人俱樂部), un syndicat d’obédience communiste fondé le 25 juin 1926 à Qingdao et presque aussitôt interdit. Parmi les signes indiquant un certain retour à la normale en dépit des troubles persistant dans la région, Zhao dirige en 1928 la compilation de la monographie locale de Jiao’ao (Jiao’ao zhi 膠澳志). Cette stabilité ne tarde pas toutefois à voler en éclats.

Au printemps 1928, la seconde phase de l’Expédition du Nord (beifa 北伐) atteint le Shandong, conduisant à la défaite de Zhang Zongchang. L’avancée de l’Armée nationale révolutionnaire provoque de vives tensions avec les troupes du général Fukuda Hikosuke 福田彦助 (1875-1959) déployées dans la province au nom de la protection des ressortissants japonais, dont 2000 résident dans la capitale Jinan et environ 15 000 à Qingdao. Un incident entre des soldats chinois et japonais à Jinan le 3 mai entraîne le massacre de plusieurs milliers de soldats et civils chinois par les troupes de Fukuda. Dans les mois qui suivent, ce dernier tente de soustraire à la souveraineté chinoise la voie de chemins de fer reliant Jinan à Qingdao, faisant craindre aux observateurs l’imposition d’une garnison japonaise sur le modèle de l’Armée du Guandong (Kantō-gun 関東軍) en Mandchourie. Si les troupes nordistes évacuent Qingdao, les autorités civiles sont, elles, confortées par le consul-général japonais Fujita Eisuke 藤田栄介 (1881-1940), qui, le 13 juin, demande à Zhao Qi de rester en place pour gérer les affaires courantes. Alors que la presse chinoise affirme qu’il s’apprête à quitter la ville, Zhao rassure ses administrés. L’Incident de Jinan sert de prétexte pour remettre sur la table la question du Shandong. La propagande nippone souligne l’incurie de Zhang Zongchang pour affirmer que le gouvernement chinois n’a pas tenu les promesses de la Conférence de Washington, espérant ainsi rallier les milieux d’affaires occidentaux de Qingdao afin d’imposer la mise en place d’un conseil municipal dominé par des délégués étrangers. Ce plan ne séduit guère les puissances occidentales en raison tout d’abord du rapport démographique très largement favorable au Japon – vingt ressortissants japonais pour un Occidental – qui laisse augurer un conseil dominé par le Japon. Cette propagande est ensuite contredite par les qualités reconnues de Zhao Qi présenté comme « le meilleur gouverneur qu’ait jamais connu le district de Qingdao » (The North China Herald, 14/07/1928).

Ces louanges d’une presse anglophone qu’inquiète à la fois les ambitions territoriales nippones et la montée du nationalisme chinois traduisent bien la position inconfortable dans laquelle se trouve Zhao Qi à l’été 1928. S’il apparaît comme un rempart chinois aux visées impérialistes des autorités militaires japonaises au Shandong, Zhao est aussi célébré pour son attitude défiante à l’égard du GMD, symbolisée par le maintien du drapeau aux cinq couleurs du Gouvernement Beiyang, alors même qu’il a perdu ses deux principaux soutiens : le « vieux maréchal » a été assassiné le 4 juin et Zhang Zongchang est repoussé vers la Mandchourie par l’armée de Bai Chongxi. En fait de loyalisme aux Nordistes, Zhao Qi fait surtout preuve d’un pragmatisme prudent. L’interdiction du “drapeau au soleil blanc sur ciel bleu et terre rouge” répond en effet à une demande du consul-général japonais à qui Zhao Qi assure qu’elle sera respectée tant que les troupes nippones seront stationnées à Qingdao. Il n’en reste pas moins qu’il ne s’oppose pas aux privilèges que s’octroient le Japon, dont les résidents à Qingdao refusent de payer leurs taxes, tandis que les navires battant pavillon japonais ne sont pas contrôlés à l’entrée du port. Les autorités nationalistes, quant à elles, vilipendent le maire de Qingdao, accusé de vouloir sauver sa place en jouant le jeu des Japonais, eux-mêmes soupçonnés de financer le retour de Zhang Zongchang au Shandong. Les dirigeants de Qingdao semblent, quant à eux, favoriser une troisième voie, celle d’un gouvernement civil autonome débarrassé de l’ingérence des militaires et qui, sans être anti-étrangers, resterait majoritairement chinois. Son existence serait toutefois conditionnée par une protection étrangère mal perçue dans l’atmosphère anti-impérialiste qui domine alors.

Déjà mauvaises, les relations entre Zhao Qi et le gouvernement de Nankin s’enveniment un peu plus à la fin de l’année 1928 à propos de la question des Huagong 華工 (travailleurs chinois). Zhao s’est entendu avec la légation espagnole de Pékin pour autoriser l’envoi depuis Qingdao de 2000 travailleurs chinois vers la colonie espagnole de Fernando Poo (act. Guinée équatoriale), pourtant connue pour ses conditions de travail particulièrement pénibles. Le sort des coolies chinois est alors au cœur du discours anti-impérialiste que contribue à diffuser l’Expédition du Nord. En dépit des centaines de milliers de Chinois partis creuser les tranchées de la Grande Guerre, la Chine n’avait pas été payée en retour de sa contribution à l’effort des Alliés en voyant les possessions allemandes au Shandong être transférées au Japon en 1919. S’ils diminuent, les flux de Huagong vers l’étranger se poursuivent dans l’entre-deux-guerres, notamment depuis le Shandong. Certes, les autorités de Pékin cherchent à endiguer ce phénomène qui s’apparente à de l’esclavage moderne, mais il est favorisé par le règne de potentats locaux qui tirent profit de ce trafic. Dans ce contexte, Zhao Qi sent le besoin de justifier publiquement sa décision en affirmant qu’il agit “pour le bien à la fois de la nation et des travailleurs, et non pas pour lui-même“, expliquant que ces départs constituent un moyen de lutter contre la faim et le chômage aggravés par les catastrophes naturelles à répétition dans la péninsule. Le 27 décembre 1928, peu avant l’embarquement des travailleurs, le Comité des affaires des Chinois d’outre-mer (qiaowu weiyuanhui 僑務委員會) du gouvernement de Nankin met toutefois son veto à l’expédition. La position de Zhao Qi devient intenable après la signature, le 28 mars 1929, de l’Accord sino-japonais de Jinan (Zhong-Ri Jinan xieding 中日濟南協定) prévoyant le départ des troupes japonaises de Qingdao. Au même moment, Zhang Zongchang échoue dans sa tentative de reconquérir la péninsule. Le 14 avril, l’envoyé spécial du parti-État nationaliste Chen Zhongfu entre dans la ville portuaire pavoisée aux couleurs du GMD pour prendre le contrôle de l’administration locale. Ce même jour, Zhao et plusieurs de ses subordonnés embarquent sur un vapeur japonais à destination des enclaves japonaises de Tianjin et Dalian. De nombreux représentants de la communauté étrangère de Qingdao sont présents sur le quai pour saluer le départ de leur maire, signe que son administration était largement appréciée, du moins par les milieux d’affaires. La presse de Shanghai affirme cependant que, deux jours plus tôt, Zhao Qi a fait envoyer 1,59 million de yuans à Dalian.

La traversée du désert entamée alors par Zhao, et qui s’achève avec l’invasion japonaise de l’été 1937, n’a laissé presque aucune trace à l’exception d’une mention de son nom dans les événements qui secouent le Shandong au tournant de l’année 1932. Zhao Qi semble en effet avoir été impliqué dans un complot visant à reprendre le contrôle de l’ancien territoire à bail. Dans une séquence encadrée par l’invasion de la Mandchourie fin 1931, bientôt suivie par le coup de force nippon à Shanghai en janvier 1932, le Shenbao fait état, le 17 décembre 1931, d’événements mystérieux survenus à Qingdao les jours précédents. Un groupe d’officiers de marine menés par Ling Xiao se serait emparé de l’amiral Shen Honglie 沈鴻烈 (1882-1969), qui vient d’être nommé maire de Qingdao par le Gouvernement national. Approuvé par le Japon, le plan prévoirait de kidnapper les dirigeants de la ville avant que la Marine japonaise ne prenne le contrôle de la ville portuaire. Un “comité local de maintien de l’ordre fantoche [wei difang weichehui 僞地方維持會]” doit alors être établi avec Zhao Qi à sa tête. Selon le journal, ce dernier serait arrivé dix jours plus tôt dans le plus grand secret pour les derniers préparatifs. Rapidement libéré, Shen Honglie s’oppose à ce que les mutins soient exécutés. Ces événements annoncent, semble-t-il, l'”Incident de Laoshan” (Laoshan shijian 嶗山事件), en avril 1932, au cours duquel le groupe de Ling Xiao échoue de nouveau à renverser Shen Honglie. Pour sa part, Zhao Qi n’est pas inquiété et réside à Qingdao jusqu’en septembre 1937. Il s’associe notamment à deux anciens cadres de l’administration du Port commercial de Jiao’ao, Yao Zuobin 姚作賓 (1893-1951) et Yao Huasun 姚華孫 (1892-?), dans l’entreprise Zhongguoshi 中國石 fondée par ces dernier en 1933 pour exploiter une carrière de pierre à proximité de Qingdao. Dans les années qui précèdent la guerre, Zhao ne fait guère parler de lui, sinon dans des encarts publicitaires pour ses publications : une réédition de son ouvrage de 1917 par la prestigieuse maison d’édition Zhonghua shuju 中華書局 en 1933, ainsi qu’une série en douze volumes sur l’histoire de sa famille intitulée Donglai Zhaoshi yingshu congkan 東萊趙氏楹書叢刊 (Collection sur la famille Zhao de Laizhou-est). Selon l’usage, elle contient des dédicaces de personnalités importantes telles que Wu Yusheng 吳郁生 (1854-1940), qui comme son plus célèbre disciple, Kang Youwei, connaît Zhao pour s’être installé à Qingdao après la chute des Qing, ou encore de Wang Jingwei, adversaire politique mais habitué des cercles poétiques. Le succès de ces ouvrages ne doit pas être à la hauteur de ses attentes, puisque Zhao Qi fait don, en octobre 1935, de cent exemplaires invendus de chacun d’eux (soit une somme totale de seulement 200 yuans pour le premier!), pour venir en aide aux sinistrés de la crue du Yangzi survenue quatre mois plus tôt.

Le retour de Zhao Qi aux affaires se fait, une nouvelle fois, dans les fourgons des maîtres du moment. La prise de Qingdao par l’armée japonaise est relativement tardive puisqu’elle n’intervient qu’au milieu du mois de janvier 1938, soit plus de six mois après le déclenchement des hostilités. Le retour de Zhao à Qingdao est annoncé dans la presse le 15 janvier pour prendre la tête, selon le processus adopté dans toutes les localités de la zone occupée, d’un Comité de maintien de l’ordre (zhi’an weichihui 治安維持會). Celui-ci publie un communiqué deux jours plus tard dans lequel il justifie sa formation par la situation de désordre attribuée au maire Shen Honglie qui a détruit des infrastructures avant de se replier avec ses troupes dans le Sud du Shandong. Le comité compte dans ses rangs plusieurs proches de Zhao comme Yao Zuobin et Lu Mengxiong 陸夢熊 (1881- 1940), qui ont tous deux travaillé sous ses ordres dans l’administration du Port commercial de Jiao’ao, ainsi que Wu Zhenwen 吳振文 ou encore Han Pengjiu 韓鵬九 (1893-). Le nombre de fonctionnaires travaillant dans l’administration établie sous la direction de Zhao passe de 796 personnes à sa formation, à 1052 à la fin de l’année 1938. Comme durant son mandat une décennie plus tôt, Zhao rassure les Occidentaux présents en Chine : “The Peace Maintenance Committee under Mr Chao Chi is doing good work and it’s civic activities appear to be in the right direction and for the good of the public and these efforts do not seem to be subject to interference from the military.” (The North China Herald, 06/08/1938). En réalité, les autorités d’occupation ont plus que leur mot à dire. Le 10 janvier 1939, le Consulat-général japonais et les services spéciaux (tokumu kikan 特務機関) de l’Armée de terre et de la Marine remplacent le Comité de maintien de l’ordre par un gouvernement de la municipalité spéciale de Qingdao (Qingdao tebieshi gongshu 青島特別是公署) à la tête duquel Zhao Qi se maintient en qualité de maire. Cette ingérence est formalisée le 25 mars 1939 par un mémorandum prévoyant que les “conseillers” (komon 顧問) japonais devront être consultés avant toute décision du gouvernement municipal. Zhao est cornaqué par le contre-amiral Shibata Yaichirō 柴田弥一郎 (1889-1981), qui dirige l’agence locale du Comité de liaison du Kōa-in en Chine du Nord (Kahoku renrakubu shutchōjo 華北連絡部青島出張所).

Si la bonne gestion financière de l’administration municipale est portée au crédit de Zhao Qi, il en va autrement du maintien de l’ordre. Désarmée par l’occupant qui se méfie de ses supplétifs chinois, la police de Qingdao est critiquée par son peu d’entrain à combattre le crime et sa propension à tirer profit de la situation en extorquant la population. Le maire lui-même est victime de cette insécurité le 29 décembre 1940. Comme de nombreux collaborateurs visés par des agents de la résistance, Zhao est victime d’une tentative d’assassinat au cours de laquelle il est atteint par une balle à la jambe. Les festivités prévues pour le nouvel an solaire sont annulées et des mesures de sécurité drastiques sont adoptées. La loi martiale est promulguée et 700 suspects arrêtés. Si Qingdao accueille, en janvier 1940, le sommet entre Wang Jingwei, Wang Kemin et Liang Hongzhi, qui précède la formation du gouvernement “central” en mars, Zhao Qi semble demeurer largement à l’écart des tractations qui accompagnent ce tournant, sans doute protégé par sa popularité auprès des Japonais. Il conserve ainsi son poste de maire jusqu’à son remplacement, le 18 mars 1943, par Yao Zuobin, ne gardant dès lors que son siège au Conseil des affaires politiques de Chine du Nord (Huabei zhengwu weiyuanhui 華北政務委員會). Son sort dans les mois qui suivent la capitulation du Japon n’est pas très clair. Arrêté en 1946 par les autorités nationalistes, Zhao Qi est jugé par la Haute cour de justice du Hebei. Le 29 mai 1947, elle le condamne à la peine de mort, assortie d’une privation de ses droits civiques à vie et de la confiscation de tous ses biens. La sentence n’est pas appliquée, puisque Zhao est jugé à nouveau par les nouvelles autorités communistes en 1949. Faisant preuve d’une magnanimité rare (et surprenante, faute de sources) pour les dignitaires “traîtres”, ces dernières libèrent Zhao qui finit ses jours à Pékin où il s’éteint en 1957.

Sa fille Zhao Zhongyu 趙仲玉 (1919-2001) est une peintre reconnue. Elle doit sa vocation à son père qui, passionné d’art, embauche le peintre russe exilé Nicolai Pickulevitch (1883-1965) comme précepteur pour sa fille. Sous l’occupation, Zhao Zhongyu contribue à développer la scène artistique de Qingdao en organisant, avec Lü Pin 呂品 (1918-1990), le Salon de peinture de Qindao (Qindao huahui 琴島畫會), autre nom pour Qingdao, à partir de novembre 1938. Elle y expose notamment l’œuvre d’une jeune peintre, Hou Yingmin 侯英民, à la suite de laquelle elle s’engage dans la résistance. Hou Yingmin est en effet la fille de Hou Zhiting 侯芝庭(1886-1981), vétéran de la Ligue jurée (tongmenghui 同盟會), qui refuse de servir dans l’administration pro-japonaise de Qingdao et participe à la résistance dans les rangs de la guérilla nationaliste au Shandong. Comme ce dernier, Zhao Zhongyu rallie le PCC pendant la guerre civile.

Sources : Zupulu ; SKJ, p. 3-4 ; SSY, p. 132 ; Xu Youchun 2007, p. 2260 ; Schrecker 1977, p. 241-244 ; Baidu (德華書院) ; Zhao Qi 1917, 1933 ; Han Shaojiang 2021, p. 12 ; Shenbao, 17/06/1928, 04/11/1928, 16/04/1929, 17/12/1931, 08/02/1934, 21/09/1935, 25/10/1935, 31/05/1947 ; The North China Herald, 01/08/1925, 08/08/1925, 14/07/1928, 19/01/1938, 06/08/1938, 18/01/1939, 25/01/1939 ; The China Weekly Review, 01/11/1925, 02/06/1928, 07/07/1928, 28/07/1928, 22/12/1928, 16/02/1929, 23/02/1929, 20/04/1929, 11/01/1941 ; The China Press, 16/06/1928, 09/09/1928, 16/04/1929 ; Benton 2022, p. 207-209 ; Zhao Xiuning 2020 ; NRSJ, p. 217 ; Qi Ren 1995 ; Wikipedia ; Zang Jie 2021.

Originaire de Jiaxing (Zhejiang), Zhu Lühe étudie en Angleterre avant de travailler comme secrétaire au ministère de la Justice du gouvernement militaire de protection de la Constitution (hufa junzhengfu 護法軍政府) établi par Sun Yat-sen à Canton en 1917. En 1927, il est nommé chef du bureau des Affaires courantes (zongwusi 總務司) du ministère des Affaires étrangères (waijiaobu 外交部) du Gouvernement nationaliste, puis secrétaire général (mishuzhang 秘書長) du Yuan législatif (lifayuan 立法院) l’année suivante. En avril 1930, il devient ministre de la Justice par intérim. Par la suite, il siège notamment au Yuan législatif (lifayuan 立法院).

En 1938, Zhu participe au Gouvernement réformé (weixin zhengfu 維新政府) de Nankin comme vice-ministre de la Justice (sifa xingzhengbu cizhang 司法行政部次長) et président de la Cour suprême de justice (zuigao fayuan 最高法院). Sous le gouvernement de Wang Jingwei, Zhu occupe notamment les postes de vice-président du Yuan législatif de septembre 1940 à février 1941 et de président du Comité disciplinaire central des fonctionnaires (zhongyang gongwuyuan chengjie weiyuanhui 中央委員會懲戒委員會) jusqu’en 1945. Placée sous l’autorité du Yuan judiciaire (sifayuan 司法院), cette institution composée de neuf à onze membres a pour mission de traiter les mises en accusation visant les agents de l’État transmises par le Yuan de contrôle (jianchayuan 監察院). Faute de pouvoir juger les affaires de corruption impliquant des hauts fonctionnaires, comme dans le cas du scandale du ministère des Vivres qui conduit à l’exécution de Hou Dachun et de Hu Zheng, le Comité disciplinaire central des fonctionnaires ne rend qu’une poignée de jugements, cléments pour la plupart. Zhu Lühe décède des suites d’une maladie en avril 1945.

Sources : MRDC, p. 206 ; Liu Guoming 2005, vol. 1, p. 644 ; MZN, p. 1044 ; Serfass 2017, p. 757, 823-824.

[ming, Xiang 翔]

Principal transfuge du Parti national-socialiste chinois (Zhongguo guojia shehuidang 中國國家社會黨, PNS) à intégrer le gouvernement collaborateur de Wang Jingwei. Originaire de Shaoxing (Zhejiang) et natif de Shanghai, Zhu Qinglai fait des études d’économie au Japon, avant de travailler pour le ministère de l’Agriculture et du commerce et pour celui des Finances sous les Qing. Aux côtés de Zhang Junmai 張君勱 (Carson Chang, 1886-1969), Zhu fonde en 1911 l’Université Shenzhou 神州大學 à Shanghai. Il enseigne dans plusieurs établissements, dont l’Université Daxia 大夏, tout en éditant le Yinhang zhoubao 銀行週報 (l’Hebdomadaire de la banque). Il publie des articles dans le journal Xinlu 新路 (Nouvelle voie) de Zhang Junmai en faveur d’une troisième voie face à l’essor du GMD et du PCC. Membre du PNS dès sa fondation en 1932, Zhu est élu au sein de son Comité central des affaires générales lors de son premier congrès à Tianjin en 1934, puis comme l’un des cinq membres dirigeants du parti lors du deuxième congrès deux ans plus tard. Il occupe des postes importants au sein de l’organisation, dont il dirige notamment la branche shanghaienne. D’inspiration sociale-démocrate, ce parti est donc très différent de son homonyme allemand.

Zhu défend dans de nombreux textes l’autonomie locale et le gouvernement constitutionnel. Actif dans le mouvement anti-japonais, il dirige l’Association de Shanghai des professeurs d’université pour le salut national et se bat, aux côtés de Song Qingling notamment, pour la libération des “sept gentilshommes” (qi junzi 七君子) arrêtés en novembre 1936 par le GMD. En juillet 1937, Zhu publie un article dans la revue Xinxueshi 新學識 (Nouveau savoir) dans lequel il reproche au PCC de faire cavalier seul au sein du front uni en prétendant adopter les Trois principes du peuple (sanmin zhuyi 三民主義) tout en refusant de renoncer à son indépendance. Mao Zedong lui répond en septembre dans son texte sur les « Tâches urgentes après la formation du front uni GMD-PCC » (guo-gong hezuo chengli hou de poqie renwu 國共合作成立後的迫切任務).

En février 1940, Zhu participe avec un autre membre du PNS, Lu Dingkui 陸鼎揆 (1896-), à la réunion organisée à Shanghai par Wang Jingwei pour rallier les dirigeants des différents petits partis. Suite à la « déclaration de paix » de Wang, le 12 mars, Zhu et Lu répondent en apportant leur soutien au Mouvement pour la paix qu’ils justifient par les promesses faites par Konoe Fumimaro et par la situation en Europe. Ils insistent notamment sur la nécessité de mettre en place rapidement le gouvernement constitutionnel (xianzheng 憲政) promis par Wang. Dans le cadre du front uni des collaborateurs, Zhu devient membre du Conseil politique central (zhongyang zhengzhi weiyuanhui 中委員會) et, le 28 mars 1940, lance un appel radiodiffusé en faveur de la paix. La défection de l’un de ses principaux associés est une source d’embarras pour Zhang Junmai qui fait déjà l’objet d’attaques du GMD et du PCC en raison de ses sympathies supposées pour l’occupant. Dans un article et une déclaration les 18 et 19 mars 1940, Zhang dénonce l’imposture du PNS pro-japonais et promet une fin rapide au gouvernement de Wang Jingwei qu’il compare à la Rhénanie. À la fondation du Gouvernement national réformé en mars 1940, Zhu Qinglai est nommé ministre des Communications (jiaotongbuzhang 交通部長) ; poste qu’il occupe jusqu’à son remplacement par Ding Mocun en août 1941. Par la suite, il enchaîne les sinécures comme président du Comité d’hydraulique (shuili weiyuanhui 水利委員會) jusqu’en août 1942, puis comme vice-président du Yuan législatif (lifayuan 立法院) jusqu’à la fin de la guerre.

Son sort après la dissolution du gouvernement de Nankin, le 16 août 1945, n’est pas très clair. Il semble qu’il ait trouvé refuge au Japon. De même que la poignée de collaborateurs chinois rescapés, tels que Zhao Yusong, autre représentant des petits partis de la “troisième voie”, Zhu y fréquente les cercles anticommunistes et affairistes formés par d’anciens officiers et diplomates japonais. Ces hommes vivotent dans des conditions souvent difficiles, comme en témoigne Iwai Eiichi dans ses mémoires. L’ancien chef des services secrets diplomatiques à Shanghai rapporte ainsi sa surprise de voir Zhu Qinglai, avec lequel il n’avait eu en Chine que de vagues rapports, sonner un jour à sa porte pour le supplier de l’héberger, se disant prêt à dormir sur un canapé. Qu’un ancien vice-président de Yuan en soit réduit à une telle misère lui serre le cœur, mais Iwai est lui-même dans une situation trop précaire pour pouvoir l’héberger. Il aide finalement Zhu à s’embarquer clandestinement sur un navire en partance de Kōbe, sans que l’on sache vers quelle destination.

Sources : MRDC, p. 1536 ; Jeans 2001 ; Fung 2000, p. 97 ; Chen Zhengqing 2006 ; Seki 2019, p. 457, 491 ; Iwai 1983, p. 253.

Originaire de Linli (Hunan), Zou Jingfang sort diplômé de l’École supérieure d’industrie du Hunan (Hunan gaodeng gongye xuexiao 湖南高等工業學校), avant de partir étudier l’économie et les sciences politiques à l’Université de Waseda 早稲田大学 (Tokyo). À partir de la fin des années 1920, il traduit plusieurs ouvrages d’histoire économique et juridique d’auteurs japonais aussi importants que Yamakawa Hitoshi 山川均 (1880-1958), Kobayashi Ushisaburō 小林丑三郎 (1866-1930) ou encore Minobe Tatsukichi 美濃部達吉 (1873-1948). Membre de la Société de sociologie chinoise (Zhongguo shehuixue she 中國社會學社) fondée en 1930, Zou est, par ailleurs, l’auteur de plusieurs synthèses en sciences sociales telles que Jingjixue yuanlun 經濟學原論 (Principes des sciences économiques, 1930) et Zhengzhixue yuanli 政治學原理 (Principes des sciences politiques, 1933). Dans le même temps, Zou travaille au service du GMD, comme secrétaire dans le quartier général de l’armée de pacification du Hunan occidental (Xiangxi jingguojun zongsilibu 湘西靖國軍總司令部), puis au ministère de l’Armée (junzhengbu 軍政部) du gouvernement militaire de Canton (Zhonghua minguo junzhengfu 中華民國軍政府). Il enseigne à l’Université Sun Yat-sen (guoli Zhongshan daxue 國立中山大學) et siège dans le Comité des affaires juridiques (fazhi weiyuanhui 法治委員會) du Gouvernement nationaliste, ainsi qu’au sein du Bureau du GMD au Hunan. Par la suite, il enseigne dans plusieurs universités shanghaiennes.

Zou rallie le Mouvement pour la paix de Wang Jingwei en 1939, en acceptant de siéger au sein du Comité exécutif central (zhongyang zhixing weiyuanhui 中央執行委員會) du GMD “orthodoxe”. Il semble qu’il soit proche de Wang Jingwei, car un rapport japonais de mars 1944 le classe dans la “faction personnelle de Wang” aux côtés d’hommes comme Chu Minyi. Après la fondation du Gouvernement national réorganisé en mars 1940, Zou sert notamment comme chef du 2e bureau du Comité des affaires militaires (junshi weiyuanhui di’erting 軍事委員會第二廳) en 1941-1942, et comme chef du bureau des conseillers du Yuan exécutif (xingzhengyuan canshiting 行政院參事廳) en 1942. En septembre 1943, il devient secrétaire général du Comité économique national (quanguo jingji weiyuanhui mishuzhang 全國經濟委員會秘書長), ainsi que vice-secrétaire général du Conseil suprême de défense nationale (zuigao guofang huiyi 最高國防會議). On perd sa trace à la fin de la guerre, mais un ouvrage intitulé Zhongguo jingjishi dagang 中國經濟史大綱 (Précis d’histoire économique de la Chine) signé Zou Jingfang est publié à compte d’auteur à Taipei en 1959, ce qui suggère qu’il aurait suivi Jiang Jieshi à Taiwan, cas de figure très rare parmi les anciens membres du régime collaborateur de Nankin.

Sources : Xu Youchun 2007, p. 2031 ; MZN, p. 1060-1061 ; Liu Guoming 2005, vol. 1, p. 1136 ; JACAR B02031689800 ; NCCU Academic Hub.

Originaire de Liping (Guizhou), Zhao Yusong est, avec Zhang Yinghua 張英華 (1886- ?), le principal transfuge du Parti de la jeunesse chinoise (Zhongguo qingnian dang 中國青年黨) au sein du gouvernement collaborateur de Wang Jingwei. Il débute sa carrière sous le patronage de Yuan Zuming 袁祖銘 (1889-1927), avant de s’installer dans le Nord-Est pour travailler comme conseiller pour la clique de l’Anhui. En 1926, il adhère au Parti de la jeunesse chinoise, fondé à Paris en 1923, et rallie, aux côtés de Yuan Zuming, l’Armée nationale révolutionnaire (guomin gemingjun 國民革命軍) au cours de l’Expédition du Nord (beifa 北伐). Suite à l’assassinat de Yuan en 1927, Zhao se réfugie au Sichuan et poursuit ses activités anticommunistes.

Durant la « décennie de Nankin », il est l’un des dirigeants du Parti de la jeunesse et le rédacteur en chef du Xin Zhongguo ribao 新中國日報 (La Nouvelle Chine). En mai 1933, il noue des relations avec les Japonais à Tianjin. Après la défection de Wang Jingwei en décembre 1938, il décide de rallier son Mouvement pour la paix au printemps 1939 avec plusieurs membres de son parti, mais échoue à obtenir la défection de son chef, Zeng Qi 曾琦 (1892-1951). Le Parti de la jeunesse chinoise est alors divisé entre les partisans de la résistance, qui participent au Conseil politique du peuple (guomin canzhenghui 國民參政會) – principale institution du second front uni à Chongqing, d’une part, et ses branches en zone occupée à Pékin et Nankin, d’autre part. Dans une lettre envoyée pour convaincre, en vain, Zuo Shunsheng 左舜生 (1893-1969) et Li Huang 李璜 (1895- 1891) de le suivre dans la collaboration, Zhao justifie son choix par son refus de la dictature de Jiang Jieshi et du GMD. Il y dénonce les contradictions de Chongqing qui, d’un côté, rend obligatoire pour tous les fonctionnaires et enseignants de prendre la carte du Parti nationaliste à partir de mars 1939 et, de l’autre, promet d’organiser une Assemblée nationale constituante l’hiver suivant. À l’inverse, il leur assure que Wang Jingwei tiendra sa promesse de mettre en place un gouvernement constitutionnel (xianzheng 憲政), troisième et dernière phase prévue par Sun Yat-sen.

En novembre 1939, Zhao organise à Shanghai le Comité d’action politique central du Parti de la jeunesse chinoise (Zhongguo qingniandang zhongyang zhengzhi xingdong weiyuanhui 中國青年黨中央行動委員會), dont il prend la tête. Comme pour les autres partis, sa représentation au sein du futur Comité politique central (zhongyang zhengzhi weiyuanhui 中央政治委員會) du régime de Nankin est conditionnée à la publication, le 14 mars 1940, d’un communiqué de soutien au Mouvement pour la paix. Dans les semaines qui précèdent l’inauguration du Gouvernement national réorganisé, le 30 mars 1940, Zhao Yusong visite à plusieurs reprises Zhou Fohai dans le but d’obtenir des postes pour lui et ses proches. La participation de Zhao Yusong au gouvernement de Nankin suscite de vives protestations de la part d’un certain Liu Hsiao-Kun, qui se dit le représentant par intérim du Parti de la jeunesse. Le 6 avril 1940, ce dernier organise une conférence de presse à Pékin pour dénier à Zhao son statut de représentant du Parti de la jeunesse et pour dénoncer le régime de Wang qu’il accuse de reproduire la dictature du GMD. Le fait que cette attaque soit publiée dans le journal officiel de la Xinminhui – principale organisation de masse en Chine du Nord – laisse penser qu’il s’agit d’un moyen pour cette dernière et ses patrons japonais d’affaiblir le nouveau régime au lendemain de son inauguration.

Membre du Comité pour la mise en place du gouvernement constitutionnel (xianzheng shishi weiyuanhui 憲政實施委員會), Zhao Yusong prône, en vain, l’adoption rapide d’une Constitution face à Zhou Fohai qui souhaite la reporter. En dépit de l’importance qu’il semble accorder au programme constitutionnel, il reste fidèle au gouvernement de Nankin après que ce programme a été enterré. Outre des postes bien rémunérés pour ses cadres, l’organisation de Zhao bénéficie du système de financement mis en place par le groupe de Wang Jingwei pour s’assurer de la loyauté des petits partis, nécessaire pour maintenir la façade du multipartisme. Cette entente passe également par des échanges de bons procédés. Zhao Yusong envoie, par exemple, une pétition au Yuan judiciaire (sifayuan 司法院) demandant la libération de Yang Congren 楊從仁, un membre du Parti de la jeunesse condamné à la prison à vie pour complicité dans un homicide commis en juin 1933 et dont la peine a été réduite à quinze ans par une amnistie prononcée au moment du « retour à la capitale » en mars 1940. Rappelant que Yang a lutté contre le PCC pendant près de dix ans, Zhao ajoute que le Parti de la jeunesse faisant aujourd’hui partie du gouvernement, sa libération serait bénéfique en raison du « besoin urgent d’hommes de talent ». Grâce aux efforts de Zhao, Yang Congren est gracié le 5 mars 1941.

Dénué de tout poids politique, sinon celui que lui confère son rôle de représentant d’un petit parti, Zhao joue les utilités. À la formation du régime, il est nommé ministre de l’Agriculture et des Mines (nongkuangbu 弄礦部) jusqu’à la fusion de ce ministère avec celui de l’Industrie en août 1941. Par la suite, il hérite des maroquins de la Justice (sifa xingzhengbu 司法行政部) jusqu’en novembre 1942, puis du Personnel (quanxubu 銓敘部) jusqu’en août 1943, avant de finir la guerre comme ministre sans portefeuille. Outre le Comité politique central, il siège dans plusieurs instances offrant des sinécures aux personnalités importantes du régime, tels que le Comité de pacification rurale (qingxiang weiyuanhui 清鄉委員會), entre 1941 et 1943, et le Comité du Gouvernement national (guomin zhengfu weiyuanhui 國民政府委員會), à partir de 1943

Après la défaite japonaise, Zhao se cache à Jinan (Shandong) puis s’enfuit à Hong Kong, avant l’arrivée des Communistes. Il s’installe, fin 1950, au Japon où il se lie d’amitié avec l’ancien ministre de l’Économie du Manzhouguo, Han Yunxie 韓雲階 (1894-1982), et rédige des textes de propagande anticommuniste à la demande de l’ancien seigneur de la guerre Yan Xishan 閻錫山 (1883-1960). De même que les quelques dizaines d’anciens collaborateurs chinois réfugiés au Japon, Zhao bénéficie de l’aide financière fournie par l’Association de bon voisinage (zenrin yūgi-kai 善隣友誼会) créée à l’initiative d’anciens diplomates en Chine comme Shimizu Tōzō et Iwai Eiichi. Suite à l’annonce de la visite à venir du président Richard Nixon (1913-1994) à Pékin au milieu de l’année 1971, Zhao tente de se suicider en ingurgitant du poison. Affaibli, il meurt quelques mois plus tard. En 1978, son ami Matsumoto Masuo 松本益雄, ancien haut fonctionnaire du Manzhouguo, traduit et publie ses mémoires sous le titre Geishunka : Chō Ikushō no Chūgoku kakumei kaikoroku 迎春花:趙毓松の中国革命回顧録 (Floraisons printanières : les Mémoires de la révolution chinoise de Zhao Yusong).

Sources : MRDC, p. 1326 ; Huang Meizhen 1987, p. 700 ; Zhongguo di’er lishi dang’anguan 1988, p. 211-217 ; ZR, p. 240, 243 ; ADF 503 ; ZG, n°146, p. 1 ; Horii 2011, p. 85 ; MZN, p. 1034-1035 ; Wikipedia ; Seki 2019, p. 474.

Né à Suzhou dans une famille de lettrés fonctionnaires descendant de l’homme politique et penseur des Song, Zhang Zai 張載 (1020-1078), Zhang Yipeng est reçu à l’examen provincial (juren 舉人) en 1893. Il part ensuite étudier à l’Université Hōsei 法政大学 (Tokyo) où il côtoie Wang Jingwei. De retour en Chine, il est fonctionnaire au ministère de la Justice (fabu 法部) ainsi que dans le Yunnan, avant de revenir à Shanghai où il dirige le comité de rédaction du Shishi xinbao 時事新報 (Les dernières nouvelles). Après la Révolution de 1911, il est un acteur important de la réforme du système judiciaire dans le Jiangsu. Chargé de dissoudre les tribunaux locaux, il rencontre une vive opposition de la part des autorités locales. Impliqué dans l’assassinat de Song Jiaoren 宋教仁 (1882-1913), il doit démissionner de ses fonctions en 1913. Il revient aux affaires en août 1917, d’abord comme chef du Bureau des finances (caizhengting 財政廳) au sein du gouvernement municipal du Jiangxi, avant d’occuper, en décembre, la place par intérim de vice-ministre de la Justice (sifabu cizhang 司法部次長) dans le gouvernement central de Pékin, puis, brièvement à l’été 1920, de ministre de la Justice (sifabu zongzhang 司法部總長). Dans le même temps, il enseigne à la Soochow University (sili dongwu daxue 私立東吳大學). Par la suite, Zhang exerce comme avocat et préside le barreau de Shanghai (Shanghai lüshi gonghui 上海律師公會) entre avril 1922 et avril 1927. L’arrivée au pouvoir du Gouvernement nationaliste entraîne, en juin 1927, une réorganisation du barreau, dont profitent certains de ses membres pour se débarrasser de Zhang.

Au début de la guerre sino-japonaise, il dirige officieusement une organisation caritative. Il fréquente à l’époque un Taïwanais se faisant appeler Su Sen 蘇森, qui travaille comme interprète pour l’armée japonaise à Shanghai, tout en faisant du renseignement pour Chongqing. Il recommande Zhang aux autorités d’occupation qui mentionnent son nom à Wang Jingwei. Comme il n’est pas resté en contact avec Zhang depuis leurs années au Japon, Wang passe par l’intermédiaire du journaliste Chen Binhe 陳彬龢 (1897-1970). À en croire Jin Xiongbai, Chen tente de convaincre Zhang en lui expliquant qu’en devenant ministre de la Justice, il pourrait aider à la libération de six cent agents de Chongqing. Zhang lui demande un temps de réflexion et contacte Chongqing qui l’enjoint de refuser l’offre. Zhang finit toutefois par accepter mais seulement pour six mois, le temps de faire libérer les résistants. C’est ainsi qu’il est désigné ministre de la Justice (sifa xingzheng buzhang 司法行政部長) du gouvernement de Nankin en décembre 1943 après l’éviction de Luo Junqiang. Au cours de son mandat, il négocie effectivement avec les Japonais pour obtenir la libération de prisonniers chinois. Suite à une des nombreuses inspections qu’il effectue dans les prisons du régime, il contracte le typhus et décède le 14 juillet 1944, exactement six mois après son entrée en fonction. Sa politique de réforme de la justice, qui vise notamment à améliorer le sort des détenus, est poursuivie par son successeur Chen Enpu.

Sources : MRDC, p. 899 ; WKS, p. 454-459 ; Xu Xiaoqun 2004, p. 122-124 ; Sun Huei-min 2012, p. 232.

Originaire du Zhili (actuel Hebei), diplômé de la prestigieuse faculté de droit de l’Université impériale de Tokyo, Zhu Shen travaille comme procureur au parquet général (zongjianchating 總檢查廳) à partir de 1913, avant d’accéder au poste de procureur général (jianchazhang 檢察長) en novembre 1915. Partisan de la clique de l’Anhui (wanxi 皖系), il est nommé ministre de la Justice (sifabu zongzhang 司法部總長) en 1918, mais doit fuir en 1920 après la victoire de la clique du Zhili (zhixi 直系). De retour à Pékin avec Duan Qirui 段祺瑞 (1865-1936) en 1925, il se voit confier la charge de directeur général de la police de la capitale (jingshi jingcha zongjian 京師警察總監). Peu après, il quitte le gouvernement pour travailler dans l’industrie.

En décembre 1937, Zhu Shen intègre la direction collégiale du Gouvernement provisoire (linshi zhengfu 臨時政府) de Pékin et obtient le poste de ministre de la Justice (fazhibu zongzhang 法制部總長). Après la fondation du Gouvernement national réorganisé de Wang Jingwei en mars 1940, Zhu siège comme membre invité (yanpin weiyuan 延聘委員) du Comité politique central (zhongyang zhengzhi weiyuanhui 中央政治委員會) et conserve sa place à Pékin, comme membre permanent (changwu weiyuan 常務委員) du Conseil des affaires politiques de Chine du Nord (Huabei zhengwu weiyuanhui 華北政務委員會).

En dépit de son profil de collaborateur de la première heure issu du Gouvernement Beiyang et du Gouvernement provisoire, Wang Jingwei croit voir en lui un allié possible. Après l’adoption par Tokyo de la “nouvelle politique chinoise” en décembre 1942, censée mieux respecter la souveraineté du régime de Nankin, Wang obtient des Japonais que Zhu Shen soit nommé président du Conseil des affaires politiques de Chine du Nord à la place de Wang Yitang en février 1943. Alors que Wang espère qu’il ne jouera qu’un rôle passager en attendant une éventuelle suppression de ce gouvernement local autonome de fait, Zhu cherche à affirmer son autorité en remplaçant certains de ses dirigeants. Son décès en juillet entraîne le retour de Wang Kemin à ce poste.

Sources : MRDC, p. 183 ; ADF 327 ; MZN, p. 1058.

Né à Haimen (Jiangsu), dans l’agglomération de Nantong 南通, au sein d’une famille de petits propriétaires fonciers, Zhang Beisheng sort diplômé en génie minier de l’Université Beiyang 北洋大學堂 (Tianjin) en 1926. Par l’intermédiaire d’un camarade, il fait la connaissance de Chen Lifu 陳立夫 (1900-2001), lui aussi un spécialiste des mines et bras droit de Jiang Jieshi. Grâce à son appui, Zhang obtient des postes dans l’appareil central du GMD, notamment comme responsable de la censure. Il est, en particulier, chargé de contrôler le contenu de la revue Geming pinglun 革命評論 (La Critique révolutionnaire) éditée par Chen Gongbo en 1928. Ne donnant pas satisfaction au Bureau central du parti, Zhang est contraint de quitter son emploi au bout de trois ans. Se tournant à nouveau vers Chen Lifu, il trouve une place comme fonctionnaire subalterne au ministère de l’Intérieur (neizhengbu 內政部). En 1932, il suit pendant six mois une formation politique à l’Académie militaire de Huangpu (Huangpu junxiao 黃埔軍校) avant d’être envoyé dans le Jiangxi où les troupes nationalistes luttent contre les soviets. Par la suite, il est recommandé par Chen Guofu 陳果夫 (1892-1951), alors gouverneur du Jiangsu, à un poste d’instructeur politique dans l’école de formation des cadres militaires et de police de Zhenjiang, puis comme chef de section au bureau de Sûreté publique du gouvernement provincial.

Peu après le déclenchement de la guerre en août 1937, il est nommé magistrat du district de Jiading 嘉定, au nord de Shanghai. Début 1938, Zhang est désigné magistrat dans sa ville natale, Nantong 南通, mais il est démis de ses fonctions un an plus tard en raison de son manque d’énergie dans la résistance au Japon. Désœuvré, il retourne à Shanghai fin 1939 où il croise son compatriote Wu Sibao 吳四寶 (1902-1942), membre de la Bande verte (qingbang 青幫) et principal lieutenant de Li Shiqun au sein de la police secrète du n°76. Zhang cherche à gagner la confiance de ce dernier en l’aidant à piéger, lors d’une partie de mahjong en mai 1940, plusieurs dirigeants locaux du GMD (Ma Yuanfang 馬元放, Zhang Mumin 掌牧民, Shi Shunyuan 石順淵, Cui Buwu 崔步武 et Zhou Xiaobo 周孝伯). À l’exception du premier, tous acceptent rapidement de faire défection. Méfiant, Li Shiqun nomme Zhang Beisheng conseiller au n°76, tout en le plaçant sous surveillance. Il est ensuite désigné chef du bureau des Affaires générales de l’École centrale de la brigade fiscale (zhongyang shuijing xuexiao 中央税警學校), le bras armé de Zhou Fohai au ministère des Finances (caizhengbu 財政部).

Mais c’est à partir du lancement de la Campagne de pacification rurale (qingxiang gongzuo 清鄉工作) à l’été 1941 que, fort de son expérience avant-guerre dans le Jiangxi, Zhang sait se rendre indispensable aussi bien auprès de Li Shiqun que des Japonais, qui voient en lui un « expert de la pacification rurale » (photo ci-dessus au côté de Wang Jingwei). Il occupe des postes importants, notamment comme chef du bureau de la Police (jingwuchu 警務處) du Jiangsu ou responsable de la zone de pacification du Sud-Jiangsu. Début 1943, il est choisi pour superviser l’extension du qingxiang au Nord-Jiangsu. Dans cette région stratégique, car abritant de nombreuses unités de guérilla communistes, Zhang traite directement avec les militaires japonais. Il obtient de pouvoir commander son propre régiment aux dépens de Li Shiqun qui espérait s’appuyer sur lui pour se constituer une armée personnelle. Aussi sa carrière n’est-elle pas affectée par l’assassinat de ce dernier, fin 1943.

Zhang Beisheng est arrêté en octobre 1945 par les autorités nationalistes qui le condamnent à mort l’année suivante. Cette peine est commuée en prison à vie en appel. En 1951, il est transféré de Shanghai à Nantong, où il est condamné à mort puis exécuté en 1954.

Sources : Xu Youchun 2007, p. 1779 ; Yu Huanhuang 1993 ; Cai Dejin 1986, p. 41-43 ; Martin 2001, p. 130 ; Xu Jiajun 2014, p. 337-338. Photo from Wang Jingwei and Lin Baisheng photograph collection, East Asia Library special collections, Stanford University.

[hao, Shuyong 叔雍]

Originaire de Wujin (Jiangsu), Zhao Zunyue est le fils du puissant secrétaire privé de Zhang Zhidong 張之洞 (1837-1909), Zhao Fengchang 趙鳳昌 (1856-1938). Disciple de Kuang Zhouyi 況周頤 (1859-1926), considéré comme l’un des « quatre grands poètes de la fin des Qing », Zhao se fait lui-même un nom dans la poésie, parallèlement à sa carrière de journaliste et de fonctionnaire. Secrétaire de direction au Shenbao 申報, il fait un bref passage comme conseiller au ministère des Chemins de fer (tiedaobu 鐵道部) début 1932, avant d’être nommé au sein du Comité de règlement politique du Yuan exécutif à Beiping (xingzhengyuan zhuping zhengwu zhengli weiyuanhui 行政院駐平政務整理委員會). Zhao occupe par la suite des postes de direction dans la banque et l’industrie. Après la défection de Wang Jingwei, fin 1938, ce proche de Zhou Fohai est envoyé à Pékin pour discuter avec Wu Peifu 吳佩孚 (1874-1939), alors pressenti comme l’un des dirigeants du futur gouvernement central de collaboration. Zhao rejoint ensuite Lin Baisheng à Shanghai pour participer à la mise en place de l’appareil de propagande du Mouvement pour la paix.

En mars 1940, il est récompensé par une sinécure comme numéro deux du ministère des Chemins de fer, ainsi que par un siège au Comité politique central (zhongyang zhengzhi weiyuanhui 中央政治委員會), dont il devient vice-secrétaire général (fumishuzhang 副秘書長) en mars 1944. En février 1942, Zhao est nommé secrétaire général de la municipalité de Shanghai ; une charge importante dans la mesure où le maire, Chen Gongbo, s’investit peu dans la gestion quotidienne de la métropole. Après la mort de Wang Jingwei et l’affaiblissement de la clique du Palais (gongguanpai 公館派) qui s’ensuit, Zhao remplace Lin Baisheng au ministère de la Propagande (xuanchuanbu 宣傳部) en décembre 1944. Il publie alors régulièrement dans la revue littéraire Gujin 古今.

Fait prisonnier une première fois le 17 août 1945 par Zhou Hao 周鎬 (1910-1949) – agent double de Chongqing don l’excès de zèle provoque un incident –  Zhao est libéré grâce à l’intervention d’Imai Takeo. Il est de nouveau arrêté par les autorités nationalistes le 27 septembre 1945 et condamné le 24 janvier 1947 à la prison à vie. Libéré l’année suivante, Zhao s’installe en 1950 à Hong Kong en 1950, où il travaille pour la maison d’édition Zhonghua shuju 中華書局 et comme enseignant. Il part peu après pour Singapour où il enseigne à l’Université Nanyang, tout en continuant à fréquenter d’anciens membres du régime collaborateur de Nankin tels que Jin Xiongbai.

Sources : MRDC, p. 1324 ; WKS, p. 98, 265 ; Fu Poshek 1993, p. 114, 131 ; Chiu 2008, p. 216 ; Wikipedia.

Natif de Shanghai, Zhao Zhengping suit une formation à l’Académie militaire du Zhejiang (Zhejiang wubei xuetang 浙江陸軍學校), avant de poursuivre, en 1905, ses études au Japon, où il intègre le département de sciences politiques de l’Université de Waseda 早稲田大学 et adhère à la Ligue jurée (tongmenghui 同盟會). Après avoir servi comme chef d’état-major chargé de l’intendance (bingzhan zongjianbu canmouzhang 兵站總監部參謀長) sous le Gouvernement provisoire de Nankin en 1912, il s’exile à la suite de l’échec de la seconde révolution l’année suivante, prenant la direction de l’École chinoise (Zhonghua xuexiao 中華學校) de Batavia (Indes orientales). En 1918, il participe à la réouverture de l’Université Jinan (guoli jinan xuexiao 國立暨南學校) à Shanghai, dont il prend la direction. Fort de son expérience indonésienne, il y favorise le retour de la jeunesse issue de la diaspora chinoise à qui est destiné cet établissement. En 1926, il devient rédacteur en chef de la revue politique shanghaïenne Taiping daobao 太平導報 (Le Guide de de la grande paix). En août 1928, peu après la prise de Pékin par les troupes nationalistes, Zhao est nommé chef du bureau des Affaires sociales (shehuiju 社會局) au sein du gouvernement municipal de Beiping (Pékin). L’année suivante, il prend la direction du bureau de l’Éducation (jiaoyuju 教育局) à la mairie de Tianjin.

Dans le contexte d’urgence nationale et de recomposition politique qui suit l’invasion de la Mandchourie par les troupes japonaises, Zhao s’implique aux côtés de son ancien camarade de l’académie militaire et principale figure de la Clique des sciences politiques (zhengxuexi 政學系)  Huang Fu 黃郛 (1880-1936) dans l’organisation de la Société savante pour construire une nouvelle Chine (Xin Zhongguo jianshe xuehui 新中國建設學會) fondée le 19 juin 1932 à Shanghai. Membre de son comité d’administration, dont il dirige le secrétariat, Zhao se voit confier la rédaction de son principal organe de presse, le mensuel Fuxing yuekan 復興月刊 (Renaissance) lancé en septembre de la même année. Cette organisation se donne pour mission « d’étudier et de développer l’économie nationale en œuvrant pour l’éducation et la culture afin de réaliser l’objectif du président [Sun Yat-sen] visant à bâtir la nouvelle Chine sur le plan de l’économie, de la culture et de la défense nationale » (cité par Song Qinghong 2020, p. 19). Zhao joue un rôle central dans le recrutement de ses membres en recommandant un grand nombre d’entre eux.  Parmi les différents groupes de travail formés au sein de la Société, il s’implique en particulier dans le groupe consacré à la réforme du système éducatif ainsi que dans son Comité de documentation (tushu weiyuanhui 圖書委員會) qui collecte plus de 30 000 ouvrages. Avec d’autres membres tels que Huang Yanpei 黃炎培 (1878-1965) et Du Chongyuan 杜重遠 (1897-1943), il reprend à son compte le discours néoconfucéen sur le rôle des notables. Leur rôle est d’aider au salut de la nation en éduquant la société par le bas, plutôt que de compter sur une solution politique venant du haut. La Société savante pour construire une nouvelle Chine possède sa propre maison d’édition dans laquelle Zhao publie en 1933 un ouvrage intitulé Xingguoji 興國記 (Notes pour l’essor du pays) composé d’essai sur les principaux souverains de l’Antiquité, depuis Yao et Shun jusqu’à l’empereur Wen des Han. Il use également du miroir du passé pour comprendre la crise provoquée par la menace japonaise dans un long essai publié en juillet 1935 dans le Fuxing yuekan qu’il fait paraître sous forme de brochure en août 1939 sous le titre « Mingji he yi wangguo 明季何以亡國 » (Comment les derniers Ming ont-ils perdu la Chine ?).

Dans les premiers jours de la guerre, Zhao participe à la Conférence de Lushan, organisée par le Gouvernement national pour organiser le front uni contre l’envahisseur japonais. Après s’être réfugié un temps à Hong Kong, il se rapproche du camp des collaborateurs par l’intermédiaire de son neveu Zhao Ruheng 趙如珩, qui occupe une charge d’inspecteur dans le ministère de l’Éducation du Gouvernement réformé (weixin zhengfu 維新政府) de Nankin. Pour autant, il n’occupe pas le poste de ministre de l’Éducation au sein de ce dernier, comme on le lit parfois. En août 1938, Zhao participe, aux côtés de Fu Shiyue et plusieurs officiers et intellectuels japonais, au groupe de travail organisé par le Bureau des services spéciaux de l’Armée expéditionnaire de Chine centrale dans le but d’amender la doctrine des Trois principe du peuple de Sun Yat-sen afin de la rendre compatible avec l’Ordre nouveau prôné par l’occupant. Zhao y préconise la formation d’un nouveau parti politique appelé Quanmindang 全民黨 (Parti du peuple tout entier). Si les sources japonaises ne font pas le lien entre le quanmin zhuyi 全民主義 de Zhao et celui de Li Shizeng 李石曾 (1881-1973), il est probable qu’il se soit inspiré de l’œuvre  de l’ancien anarchiste devenu l’un des principaux opposants au PCC au sein du GMD. En effet, le concept de quanmin zhuyi est utilisé à la fin des années 1920 par Li donner une interprétation anticommuniste des Trois principes du peuple – et notamment du « bien-être du peuple » (minsheng zhuyi 民生主義). Cette notion traduit celle de « réconciliation des classes » de Pierre-Joseph Proudhon (1809-1865) qui s’oppose à la dictature du prolétariat des marxistes-léninistes. Dans le contexte de l’occupation, le quanmin zhuyi de Zhao se présente comme une alternative aux idéologies panasiatistes et anti-GMD de la Xinminhui 新民會 en Chine du Nord et à l’Association Concordia (Xiehehui 協和會) au Manzhouguo. Ce projet sans doute trop ambitieux n’est pas retenu. Les autorités japonaises lui préfèrent une « Nouvelle doctrine des Trois principes du peuple » mettant l’accent sur le panasiatisme et expurgée de toute trace d’influence communiste. Au début du mois de septembre 1938, Zhao se rend avec Fu Shiyue à Hong Kong pour remettre le fruit de ce travail à Gao Zongwu et Mei Siping, lequel le transmet à Zhou Fohai à Chongqing. C’est ainsi que Zhao est amené à intégrer ce qui va devenir le groupe de Wang Jingwei, après la défection de ce dernier en décembre 1938. Son capital politique au sein de l’État d’occupation repose sur son imposant carnet d’adresse dans le milieu éducatif chinois, qui est l’une des principales cibles de l’entreprise de recrutement mené par le groupe de Wang Jingwei après son arrivée à Shanghai en mai 1939.

Au moment de la formation du Gouvernement national réorganisé le 30 mars 1940, Zhao est désigné ministre de l’Éducation (jiaoyubuzhang 教育部長). Il occupe parallèlement d’autres fonctions comme celle de directeur de la Bibliothèque nationale (guoli zhongyang tushuguan 國立中央圖書館). Zhao se trouve rapidement l’otage des querelles de factions dont son ministère est l’un des théâtres. L’objet du conflit est la répartition des postes de seconds que se disputent la clique CC de Zhou Fohai et la clique du Palais (gongguanpai 公館派) autour de Wang Jingwei. Membre de la première et responsable du recrutement des intellectuels, Ding Mocun recourt aux menaces physiques pour imposer ses candidats tels Dai Yingfu. Durant son mandat comme ministre de l’Éducation, Zhao fait adopter, le 26 novembre 1940, une hausse de la bourse offerte aux étudiants chinois séjournant au Japon. Il contribue également à la mobilisation de la jeunesse en faveur du nouveau régime en rétablissant, au printemps 1941, les Boy-scouts (tongzijun 童子軍) afin, dit-il, d’aider les écoliers à “développer leur personnalité” et pour “encourager les bonnes habitudes” (cité dans Taylor 2021, p. 22-23). Dans les faits, cette organisation est surtout utilisée pour faciliter l’organisation de manifestations à la gloire de Wang Jingwei. Fin mars 1941, Zhao intègre le Comité de pacification rurale (qingxiang weiyuanhui 清鄉委員會) qui doit, sous la houlette de Li Shiqun, étendre cette mobilisation aux campagnes du Jiangnan.

Lors du remaniement d’août 1941, Zhao est remplacé au ministère de l’Éducation par un proche de Wang Jingwei, Li Shengwu. Il doit notamment sa disgrâce à l’antipathie que développe Chen Bijun à son égard. Il prend alors la tête de l’Université nationale de Shanghai (guoli Shanghai daxue 國立上海大學) créée en septembre 1942 à partir d’une école d’agronomie établie à la demande des Japonais sur le terrain de l’Université Fudan 復旦大學. L’Université de Shanghai est à moitié gérée par les Japonais, qui refusent de la baptiser Université Sun Yat-sen (Zhongshan daxue 中山大學), comme le demandait Wang Jingwei, en violation de la loi de 1928 interdisant l’usage de cette appellation omniprésente pour les institutions n’ayant pas été fondées par le “père de la nation” en personne. L’ambassade du Japon fait don à l’établissement des ouvrages confisqués par les troupes d’occupation dans le Jiangnan. Les circonstances dans lesquelles Zheng meurt varient selon les sources. Il se serait suicidé peu après la défaite du Japon ou serait mort de maladie dans une cachette à Ningbo.

Sources : Xu Youchun 2007, p. 2268 ; Yan Youwen 1993 ; Zhou Chuan 2012, p. 455 ; Guoli Shanghai daxue 1943, p. 1 ; Wikipedia ; Baidu (Fuxing yuekan) ; AH 118- 010100-0039-058 ; Paulès 2020, p. 158 ; Liu Jie 1995, p. 332-341 ; Miyoshi 2006, p. 38 ; Taylor 2021, p. 22-23 ; Martin 2001, p. 59 ; Song Qinghong 2020 ; Xiao-Planes 2010b, p. 334 ; Wang Jizhou 2020, p. 127-138 ; Liu Jie 1995, p. 332-341 ; Tsui 2018, p. 50-51.

Biographical Dictionary of Occupied China

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