Wang Yitang

王揖唐

18771948

Lieu d'origine

Hefei 合肥

Province d'origine

Anhui 安徽

Natif de Hefei (Anhui), Wang Yitang est l’un des derniers lauréats du plus haut grade (jinshi 進士) des examens impériaux en 1904, un an avant leur abolition. Cette même année, il est sélectionné pour étudier au Japon. Il se forme dans un premier temps au Tōkyō shinbu gakkō 東京振武学校, école militaire préparatoire accueillant les étudiants chinois désireux d’intégrer l’École d’officiers de l’armée de terre (rikugun shikan gakkō 陸軍士官学校). Hésitant entre la carrière militaire et civile, Wang suit également des cours de droit à l’Université Hōsei 法政大学 (Tokyo), alors fréquentée par Wang Jingwei. Contrairement à ce dernier, il ne rejoint pas le mouvement révolutionnaire de Sun Yat-sen, mais l’Association générale des étudiants chinois au Japon (liuri xuesheng zonghui 留日學生總會) dont le fondateur, Yang Du 楊度 (1875-1931), prône la mise en place d’une monarchie constitutionnelle. De retour en Chine en 1907, Wang Yitang sert notamment dans l’état-major du vice-roi des trois provinces de l’Est (dong sansheng zongshu 東三省總督), Xu Shichang 徐世昌 (1855-1939). En 1909, il est choisi pour accompagner l’envoyé impérial Dai Hongci 戴鸿慈 (1853-1910) lors de sa visite en Russie. Il se rend ensuite en Allemagne pour compléter sa formation militaire, avant de parcourir l’Europe et les États-Unis pour y observer les dernières innovations en matière militaire ou encore ferroviaire. Au lendemain de la révolution de 1911, il est recommandé par Xu Shichang à Yuan Shikai qui le nomme au sein du secrétariat de la présidence, ainsi que conseiller militaire et lieutenant général dans son armée.

Alors que la Chine républicaine voit apparaître de nombreux partis politiques à la veille des élections législatives, Wang adhère à plusieurs organisations qui fusionnent en mai 1912 pour former le Parti républicain (gonghedang 共和黨) dirigé par Li Yuanhong 黎元洪 (1864-1928). Si Wang est élu pour représenter le Tibet au Sénat (canyiyuan 參議院), son parti est largement devancé par le GMD. Il fusionne avec le Parti démocrate (minzhudang 民主黨) et le Parti de l’unité (tongyidang 統一黨) pour donner naissance au Parti progressiste (jinbudang 進步黨), qui, sous la houlette de Li Yuanhong et de Liang Qichao, apporte son soutien à Yuan Shikai. Après avoir dissous le parlement en janvier 1914, ce dernier met en place un Conseil politique central (zhongyang zhengzhi huiyi 中央政治會議) au sein duquel Wang est élu représentant de l’Anhui. Il participe aux travaux de la “Nouvelle Constitution provisoire” (xin yuefa 新約法) promulguée en mai 1914, qui officialise les pleins pouvoirs détenus par Yuan Shikai. Nommé gouverneur (xun’anshi 巡按使) du Jilin en août 1915, Wang se voit décerner le titre de baron en remerciement pour son soutien au projet de restauration dynastique de Yuan. Suite à l’avènement avorté de la nouvelle dynastie, Wang est rappelé à Pékin pour assumer la charge de ministre de l’Intérieur (neiwu zongzhang 內務總長) dans le cabinet de Duan Qirui 段祺瑞 (1865-1936) entre avril et juin 1916. À la mort de Yuan Shikai, Wang démissionne et part pour un nouveau voyage d’observation en Europe jusqu’en avril 1917.

À son retour en Chine, il prête main forte à Duan Qirui, devenu le chef de la Clique de l’Anhui (Wanxi 皖系), pour modifier les lois de 1912 relatives à l’élection du Parlement afin de prévenir tout retour au pouvoir de Sun Yat-sen à l’issue des élections prévues en juin. Le 8 mars 1918, Wang et Xu Shichang organisent un groupe de soutien à Duan dans la ruelle Anfu de Pékin. Connue par la suite sous le nom de Club Anfu (Anfu julebu 安福俱樂部), cette organisation aidée par le Japon remporte une victoire écrasante aux élections lui permettant de dominer le Parlement croupion formé en août 1918. Élu président de la Chambre des députés (zhongyiyuan 眾議院), Wang fait élire son ancien mentor Xu Shichang au poste honorifique de président de la République. La défaite de la Clique de l’Anhui face à la Clique du Zhili (Zhixi 直系) en juillet 1920 met un terme provisoire à la carrière politique de Wang. Visé par un mandat d’arrêt signé par Xu Shichang, il s’enfuit au Japon. Au printemps 1924, il retourne discrètement en Chine où il retrouve à Tianjin des partisans de Duan Qirui. Duan revient aux affaires comme chef exécutif par intérim du gouvernement de Pékin à la demande de Zhang Zuolin et de Feng Yuxiang. En novembre 1924, Wang Yitang est nommé gouverneur de l’Anhui et se voit confier la direction des affaires militaires dans sa province natale. Il doit toutefois abandonner son poste dès avril 1925 à la demande de Zhang Zuolin. Retiré à Tianjin, Wang se consacre au bouddhisme. L’Expédition du Nord (beifa 北伐) victorieuse des Nationalistes lui vaut d’être à nouveau visé par un mandat d’arrêt auquel il échappe en trouvant refuge dans la concession japonaise de Tianjin. Fin lettré, Wang publie alors sous le nom de plume Wang Yitang 王逸塘 une série d’essais plus tard regroupés sous le titre Jin chuanshilou shihua 今傳是樓詩話 (Propos sur la poésie du nouveau Pavillon pour la transmission de la vérité) qui lui gagne le respect des milieux cultivés.

En 1931, Wang est nommé par Zhang Xueliang au sein du Conseil des affaires politiques du Nord-Est (dongbei zhengwu weiyuanhui 東北政務委員會), rebaptisé Conseil des affaires politiques de Beiping (Beiping zhengwu weiyuanhui 北平政務委員會) après l’invasion japonaise de la Mandchourie. Avec d’autres anciens dirigeants des gouvernements Beiyang tels Wang Kemin, Wang siège dans les instances successives mises en place sous l’autorité du Gouvernement national de Nankin pour gérer le Nord du pays, comme le Comité de règlement politique du Yuan exécutif à Beiping (xingzhengyuan zhu-Ping zhengwu zhengli weiyuanhui 行政院駐平政務整理委員會) fondé en juin 1933, puis le Conseil des affaires politique du Hebei-Chahar (Ji-Cha zhengwu weiyuanhui 冀察政務委員會) formé en 1935. Par ailleurs, Wang devient directeur général de la Banque d’échange de Tianjin (Tianjin huiye yinhang 天津匯業銀行) et chef du bureau du Commerce et de l’Industrie (shiyebu 實業部) au sein du Gouvernement militaire de Mongolie (Menggu junzhengfu 蒙古軍政府) fondé en mai 1936 avec l’aide de l’Armée du Guandong (Kantō-gun 関東軍). Le tropisme japonais de Wang Yitang transparaît également dans son Dongyou shilüe 東遊紀略 (Notes de voyage à l’Est), publié à Tianjin en décembre 1934, qu’il conclut par un plaidoyer en faveur de l’entente sino-japonaise fondée par une culture confucéenne et bouddhiste commune.

Recruté à Tianjin par l’occupant japonais au début de la guerre sino-japonaise, Wang Yitang s’impose, aux côtés de Wang Kemin, comme l’un des principaux dirigeants collaborateurs en Chine du Nord. Bien que parents – son épouse Gu Hongzhu 顧紅珠 est la mère adoptive de la femme de Wang Kemin, ils rivalisent tout au long de l’occupation pour la place de numéro un à Pékin. Il est vrai que le premier est issu de la Clique de l’Anhui, tandis que le second a fréquenté celle du Zhili et qu’il est connu pour être jaloux de ses prérogatives. Les deux hommes se distinguent également par leur style vestimentaire. Dans ses mémoires, le journaliste Gao Baishi 高拜石 (1901-1969) note d’un ton moqueur que Wang Yitang affecte un style de lettré fonctionnaire. À la différence du banquier Wang Kemin qui “aimait porter des costumes occidentaux, Wang Yitang aimait au contraire s’habiller d’une robe longue et d’une jaquette à col montant. Les manches exagérément longues et la robe trop large, il marchait à pas comptés, regardant devant lui d’un air grave“. C’est Wang Kemin qui joue les premiers rôles dans le Gouvernement provisoire (linshi zhengfu 臨時政府) fondé à Pékin le 14 décembre 1937. Wang Yitang doit se contenter d’occuper l’un des huit sièges du comité permanent, qu’il cumule avec la direction du ministère de l’Aide aux réfugiés (zhenjibu 賑濟部) et, à sa fondation en septembre 1938, du ministère de l’Intérieur (neizhengbu 內政部).

Au moment de la formation du gouvernement de Nankin en mars 1940, Wang Yitang est nommé président du Yuan d’examen (kaoshiyuan 考試院), un poste essentiellement honorifique. S’il tente, au début, de sauver les apparences, expliquant lors de son premier passage à Nankin en juillet qu’il est retenu à Pékin par l’organisation du premier examen de la haute fonction publique, Wang se désintéresse rapidement de cette fonction. Il laisse au vice-président du Yuan d’examen, Jiang Kanghu, le soin de gérer cette administration chargée du recrutement et de l’évaluation des fonctionnaires. Dès l’année suivante, il demande à pouvoir démissionner. Wang Jingwei temporise de crainte que cette démission n’apparaisse comme une rupture entre Nankin et Pékin. En effet, Nankin attache la plus grande importance aux signes contredisant l’autonomie de fait du gouvernement de Pékin. Wang Jingwei cherche à tirer profit de la rivalité entre l’arrogant Wang Kemin et Wang Yitang pour faire avancer son projet centralisateur. En juin 1940, il obtient de sa tutelle japonaise que Wang Kemin soit remplacé par Wang Yitang à la tête du Conseil des affaires politiques de Chine du Nord (Huabei zhengwu weiyuanhui 華北政務委員會). L’espoir que place le groupe de Wang Jingwei dans ce remaniement pour étendre son autorité à Pékin est rapidement déçu. Dans une lettre adressée le 21 août 1940 à Wang Jingwei, Zhou Fohai se plaint que, dans un discours radiodiffusé, Wang Yitang ait placé le Gouvernement national et le Conseil des affaires politiques de Chine du Nord sur le même plan. Le 4 décembre, Zhou se lamente dans son journal personnel que les tentatives de Nankin d’avancer ses pions à Pékin soient systématiquement contrecarrées par Wang Yitang et ses alliés japonais : “Tant qu’on ne se sera pas débarrassé de cet enragé [ci liao bu qu 此獠不去], il sera impossible d’atténuer le particularisme croissant [teshuhua 特殊化] de la Chine du Nord“.

Après trois demandes de démission, Wang Yitang obtient finalement d’être remplacé à la présidence du Yuan d’examen par Jiang Kanghu en mars 1942. Un an plus tard, en août 1943, il perd celle du Conseil des affaires politiques de Chine du Nord au profit de Zhu Shen. Jugé pour trahison après la guerre, il tente, sans succès, de reporter son procès pour raison de santé. Il est exécuté le 10 septembre 1948.

Sources : MRZ, vol. 12, p. 727-731 ; BDRC, vol. 3, p. 382 ; MRDC, p. 86 ; SSY, p. 8-9 ; Huai Ran 1993 ; Baidu ; Wang Yitang 1934 ; Gao Baishi 2002, p. 232 ; MZN, p. 1021 ; AH 118-010100-0035-011 ; ZR, p. 388 ; KG, n°3, p. 65 ; JACAR B02030602800.

Pour citer cette biographie : David Serfass, "Wang Yitang  王揖唐 (1877-1948)", Dictionnaire biographique de la Chine occupée, URL : https://bdoc.enpchina.eu/bios/wang-yitang/, dernière mise à jour le 27 juillet 2024. 

Biographical Dictionary of Occupied China

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