[zi Jizhi 績之]
Originaire de Songjiang (Jiangsu), Geng Jiagi suit à l’âge de sept ans son père lorsque celui-ci est envoyé en Belgique pour y représenter le gouvernement Qing. À son retour en Chine, il travaille d’abord au ministère des Affaires étrangères puis comme secrétaire francophone du gouvernement municipal de Shanghai. Il se rend ainsi indispensable dans les relations entre les autorités chinoises et françaises, ce qui lui permet de s’enrichir grâce au trafic d’opium qui transite par la concession.
Les circonstances de son ralliement au Mouvement pour la paix Wang Jingwei diffèrent selon les sources. À en croire son ami Joseph Shieh (Xue Gengxin 薛耕莘, 1904-2008), ancien chef de la police dans la concession française, « C.C. Keng » reçoit l’ordre de rester à Shanghai après le départ des Nationalistes. Le dernier maire de Shanghai, Yu Hongjun 俞鴻鈞 (1898-1960) lui confie une forte somme d’argent destinée à salarier le personnel de la mairie, afin d’éviter qu’il ne collabore avec l’occupant. L’argent vient cependant à manquer et les banques se retournent contre Geng. Celui-ci est finalement sauvé par son ancien supérieur, Wang Jingwei, qui éponge la dette et recrute, malgré lui, le pauvre Geng Jiaji, « profondément hostile » au camp pro-japonais.
Selon la version de Jin Xiongbai, Geng se réfugie à Hong Kong au début de la guerre, avant de retourner à Shanghai. Zhou Fohai cherche alors à le recruter afin de profiter de ses relations avec les Français, mais découvre que Geng a déjà été approché par son compatriote Sun Shilin 孫時霖 pour le compte de Li Shiqun. Bien que Jin Xiongbai soit parvenu à le faire participer au « groupe des dix » (la faction de Zhou), Geng ne réussit à s’imposer ni aux côtés de Zhou ni auprès de Li, en raison des jalousies que suscite sa carrière d’avant-guerre. Il occupe des postes obscurs tels que membre suppléant du Comité central de contrôle du GMD (guomindang zhongyang jiancha weiyuanhui 國民黨中央監察委員會) ou encore comme membre du Comité spécial des affaires étrangères du Comité politique central (zhongyang zhengzhi weiyuanhui waijiao zhuanmen weiyuanhui 中央政治委員會外交專門委員會).
Les réceptions qu’il organise dans sa villa de la concession française sont réputées pour leur munificence et pour la protection offerte par la police française. Au moment de la rétrocession, en juillet 1943, il est naturellement pressenti pour prendre la tête de ce qui est désormais la 8e zone de Shanghai. Les accusations de corruption à son encontre conduisent cependant le maire, Chen Gongbo, à cumuler le poste lui-même, tandis que Geng doit se contenter de la direction du bureau des Affaires générales. Fin 1943, Zhou Fohai l’associe à ses projets en lien avec Chongqing. Geng est chargé d’entrer en contact avec un résistant français se faisant passer pour un agent de Vichy.
Au cours de l’année 1943, cependant, il se compromet dans le trafic de riz organisé par Hou Dachun. L’affaire le rattrape, fin janvier 1944, lorsque la kenpeitai de Suzhou le convoque. Après avoir pris ses dispositions, il se tire une balle dans la tête au début du mois suivant. Jin Xiongbai affirme que Geng avait placé un pistolet dans chacune des pièces de sa villa afin de pouvoir se suicider plutôt que de se voir déshonoré par l’occupant. Comme le note le consul français, Geng choisit de donner un caractère politique à son acte en léguant l’arme du suicide à Wang Jingwei et en protestant de son innocence auprès de son supérieur direct, Chen Gongbo.
Sources : MRDC, p. 645 ; Zhou Jiazhen 2000, p. 204 ; WKS, p. 368-372 ; Shieh 1995, p. 163-164 ; Ji Xilin 1989 ; ADF 77.
[zi Jizhi 績之]
A native of Songjiang, Jiangsu, Geng Jiagi followed his father, a Qing diplomat, to Belgium at the age of seven. After returning to China, he worked first at the Ministry of Foreign Affairs and then as the French-speaking secretary of the Shanghai municipal government. He thus became indispensable in the relations between the Chinese and French authorities, which allowed him to prosper thanks to the opium traffic transiting through the concession.
The circumstances surrounding his recruitment by the Peace Movement vary from one source to another. According to his friend Joseph Shieh (Xue Gengxin 薛耕莘, 1904-2008), a former police chief in the French concession, “C.C. Keng” was ordered to stay in Shanghai after the Nationalists left. The last mayor of Shanghai, Yu Hongjun 俞鴻鈞 (1898-1960) entrusted him with a large sum of money intended to pay the City Hall staff, in order to prevent them from collaborating with the occupier. However, the money ran out and the banks turned against Geng. He was finally saved by his former superior, Wang Jingwei, who paid off the debt and recruited, against his wishes, the poor Geng Jiaji, “deeply hostile” to the pro-Japanese camp.
According to Jin Xiongbai’s account, Geng fled to Hong Kong at the beginning of the war, before returning to Shanghai. Zhou Fohai then sought to recruit him in order to benefit from his connections with the French, but discovered that Geng had already been approached by his compatriot Sun Shilin 孫時霖 on behalf of Li Shiqun. Although Jin Xiongbai managed to get him into the “Group of Ten” (Zhou’s faction), Geng was unable to assert himself either with Zhou or with Li because of jealousies over his pre-war career. He held obscure positions such as alternate member of the GMD Central Control Committee (guomindang zhongyang jiancha weiyuanhui 國民黨中央監察委員會) or even as member of the Central Political Committee’s Foreign Affairs Special Committee (zhongyang zhengzhi weiyuanhui waijiao zhuanmen weiyuanhui 中央政治委員會外交專門委員會).
The parties he organized in his villa located in the French concession were renowned for their munificence and for the protection offered by the French police. At the time of the handover, in July 1943, he was expected to take over the leadership of what was now Shanghai’s 8th zone. However, accusations of corruption against him led the mayor, Chen Gongbo, to assume the post himself, while Geng was left with the position of head of the General Affairs Department. At the end of 1943, Zhou Fohai involved him in his projects with Chongqing. Geng was asked to make contact with a French resistance fighter posing as a Vichy agent.
In 1943, however, he was involved in the rice traffic organized by Hou Dachun. The scandal caught up with Geng at the end of January 1944, when the Suzhou kenpeitai summoned him. After making arrangements, he shot himself in the head at the beginning of the following month. According to Jin Xiongbai, Geng kept a pistol in each room of his villa so that he could commit suicide rather than be dishonored by the occupiers. As the French consul observed, Geng chose to give a political character to his act by bequeathing the suicide weapon to Wang Jingwei and by protesting his innocence to his direct superior, Chen Gongbo.