Originaire de Jingde (Anhui), Jiang Chaozong doit arrêter ses études à l’âge de quatorze ans, suite à l’appauvrissement de sa famille. Il entre comme apprenti dans une maison de commerce appartenant à la famille de Liu Mingchuan 劉銘傳 (1836-1896), célèbre homme d’État de l’Anhui, chargé par la cour Qing de moderniser Taiwan après s’être illustré dans la guerre contre la France de 1884-1885 à la tête de l’armée de la Huai. Jiang parvient à se faire embaucher sur l’île comme secrétaire auprès de Liu, devenu le premier gouverneur de Taiwan en 1887. Profitant de sa nouvelle position, il soutire des pots-de-vin aux fonctionnaires et notables locaux, mais ne tarde pas à être découvert. Liu Mingchuan le fait arrêter en 1889 et, après avoir envisagé un châtiment plus radical, l’expulse de Taiwan.
De retour sur le continent, Jiang trouve, grâce à la recommandation d’un parent fonctionnaire à Tianjin, un emploi de copiste pour un lieutenant-colonel des Bataillons verts (lüying 綠營). Particulièrement satisfait du jeune homme, ce dernier envisage de le marier à sa fille en lui donnant son patronyme, mais apprend qu’il est déjà marié. Décidé à ne pas laisser passer l’occasion, Jiang forge de faux papiers pour faire croire au décès de son épouse et entre dans la famille de son patron. Suite au décès de celui-ci, en 1902, Jiang hérite de tous ses biens. L’année suivante, Jiang obtient du troisième fils de Liu Mingchuan qu’il le recommande à son beau-frère Yuan Shikai, alors vice-roi du Zhili à Tianjin. Ce dernier lui promet un poste dans le gouvernement local de Zhengding, qui lui passe finalement sous le nez. À l’avènement du dernier empereur, en 1908, Yuan Shikai est mis à la retraite forcée. Jiang Chaozong se trouve alors un nouveau protecteur en la personne de Tieliang 鐵良 (1863-1939), un général mandchou qui lui confie le poste d’inspecteur du Bureau d’entraînement des troupes de la banlieue de Pékin (jinji dulian gongsuo jichachu duli 近畿督練公所稽查處督理). Il parvient même à se faire nommer au sein de la garde de nuit de la Cité interdite (suwei yingwuchu 宿衛營務處). Lorsque cette dernière charge est supprimée en 1910, Jiang est promu général de 2e classe (zheng erpin zongbing 正二品總兵) en poste à Hanzhong (Shaanxi).
Lorsque le Shaanxi proclame son indépendance durant la Révolution de 1911, Jiang rentre à la capitale. Accueilli froidement par Yuan Shikai, désormais tout puissant, il gagne les faveurs du vice-ministre des Affaires civiles (minzhengbu 民政部), Zhao Bingjun 超秉鈞 (1859-1914). Ce dernier recommande Jiang à Yuan Shikai quand celui-ci, nommé entre-temps président de la République de Chine, cherche à s’assurer la loyauté de l’ancienne Garde impériale (jinweijun 禁衛軍), toujours sous l’influence de ses officiers mandchous comme Wuzhen 烏珍 (?-1912). Jiang ne tarde pas à supplanter Wuzhen et s’impose comme commandant de la gendarmerie de Pékin (bujun tongling 步軍統領). La puissance de Jiang croît avec celle de Yuan. Il s’enrichit en dépouillant l’aristocratie mandchoue et grâce aux juteuses récompenses que lui verse Yuan pour l’arrestation de ses opposants. Il compte parmi les quelques soutiens de Yuan au moment de sa tentative manquée de restauration impériale en 1915. Jiang conserve son pouvoir après la mort de Yuan l’année suivante. En mai 1917, il profite de la querelle entre le nouveau président de la république Li Yuanhong 黎元洪 (1864-1928) et son premier ministre Duan Qirui 段祺瑞 (1865-1936) pour se faire nommer, par intérim, à la place de ce dernier. Jiang rallie alors le général loyaliste Zhang Xun 張勳 (1854-1923), qui tente de restaurer Puyi 溥儀 (1906-1967) sur le trône, mais ne tarde pas à le trahir pour Duan Qirui. Lorsque ce dernier reprend le contrôle sur la capitale, le 14 juillet 1917, il retire à Jiang son poste de commandant de la gendarmerie pékinoise. Après la défaite de la Clique de l’Anhui (wanxi 皖系) en 1920, Jiang organise à Pékin une Association de soutien à l’Anhui (wanshi cunjinhui 皖事促進會) sans grand effet. En 1932, Wu Peifu 吳佩孚 (1874-1939) invite Jiang à être le vice-président de la Nouvelle association religieuse pour le salut du monde (jiushi xinjiaohui 救世新教會) qu’il préside. Sous couvert d’activisme anti-japonais, Wu cherche à remobiliser les forces de la Clique du Zhili (zhixi 直系), mais son plan est stoppé net par Jiang Jieshi.
Au lendemain de l’occupation de Pékin par les Japonais fin juillet 1937, Jiang Chaozong retrouve une position de premier plan en se faisant nommer à la tête du Comité de maintien de l’ordre (zhi’an weichihui 治安維持會), puis comme maire de l’ancienne capitale entre le 15 décembre 1937 et le 15 janvier 1938. Il est toutefois rapidement relégué à une position secondaire après la mise en place du Gouvernement provisoire (linshi zhengfu 臨時政府), le 14 décembre 1937, au sein duquel il n’obtient qu’un titre honorifique de membre du comité gouvernemental (zhengfu weiyuan 政府委員). Furieux d’être écarté, Jiang supprime toutes les taxes commerciales de la ville à la veille de quitter son poste de maire. Wang Kemin se plaint aux autorités japonaises et fait rétablir la législation antérieure. Par la suite, Jiang est nommé conseiller militaire par le vice-chef d’état-major de l’Armée régionale de Chine du Nord, Kawabe Masakazu 河辺正三 (1886-1965). Jiang participe également à la mise en place d’une Commission de stratégie économique pour la Chine du Nord (huabei jingji duice xieyihui 華北經濟對策協議會), dont il prend la vice-présidence. Après le remplacement du Gouvernement provisoire par le Conseil des affaires politiques de Chine du Nord (Huabei zhengwu weiyuanhui 華北政務委員會) en mars 1940, Jiang conserve une position honorifique. Il décède de maladie le 1er octobre 1943, bien que certaines sources datent son décès de fin 1945.
Sources : MRDC, p. 229 ; MRZ, vol. 10, p. 181-187 ; MZN, p. 1138.
Born in Jingde (Anhui), Jiang Chaozong was forced to discontinue his studies at the age of fourteen due to his family’s impoverishment. He entered as an apprentice in a trading house belonging to the family of Liu Mingchuan 劉銘傳 (1836-1896), a renowned statesman from Anhui who was tasked by the Qing court with modernizing Taiwan after distinguishing himself in the Sino-French War of 1884-1885 as the leader of the Huai Army. Jiang managed to secure employment on the island as a secretary to Liu, who had become the first governor of Taiwan in 1887. Taking advantage of his new position, he extorted bribes from local officials and notables but was soon discovered. In 1889, Liu Mingchuan had him arrested and, after considering a more severe punishment, expelled him from Taiwan.
Upon his return to the mainland, Jiang secured a position as a copyist for a lieutenant colonel of the Green Standard Army (lüying 綠營), thanks to the recommendation of a relative who was an official in Tianjin. Particularly satisfied with the young man, the latter considered marrying him to his daughter by giving him his surname, but learned that Jiang was already married. Determined not to let the opportunity pass, Jiang forged false papers to make it appear that his wife had died and entered his patron’s family. Following the death of his patron in 1902, Jiang inherited all his possessions. The following year, Jiang obtained a recommendation from Liu Mingchuan’s third son to his brother-in-law Yuan Shikai, then viceroy of Zhili in Tianjin. The latter promised him a position in the local government of Zhengding, which ultimately slipped through his fingers. Upon the accession of the last emperor in 1908, Yuan Shikai was forced into retirement. Jiang Chaozong then found a new patron in the person of Tieliang 鐵良 (1863-1939), a Manchu general who entrusted him with the position of inspector at the Metropolitan Training Office (jinji dulian gongsuo jichachu duli 近畿督練公所稽查處督理). He even managed to get himself appointed to the night guard of the Forbidden City (suwei yingwuchu 宿衛營務處). When this last position was abolished in 1910, Jiang was promoted to the rank of second-class general (zheng erpin zongbing 正二品總兵) and posted to Hanzhong (Shaanxi).
When Shaanxi declared its independence during the 1911 Revolution, Jiang returned to the capital. Coldly received by Yuan Shikai, now all-powerful, he gained the favor of the vice-minister of Civil Affairs (minzhengbu 民政部), Zhao Bingjun 超秉鈞 (1859-1914). The latter recommended Jiang to Yuan Shikai when he, having been appointed president of the Republic of China in the meantime, sought to secure the loyalty of the former Imperial Guard (jinweijun 禁衛軍), still under the influence of its Manchu officers such as Wuzhen 烏珍 (?-1912). Jiang soon supplanted Wuzhen and established himself as the commander of the Beijing Gendarmerie (bujun tongling 步軍統領). Jiang’s power grew along with Yuan‘s. He enriched himself by plundering the Manchu aristocracy and through the lucrative rewards Yuan paid him for the arrest of his opponents. He was among the few supporters of Yuan at the time of his failed attempt at imperial restoration in 1915. Jiang retained his power after Yuan‘s death the following year. In May 1917, he took advantage of the quarrel between the new president of the republic, Li Yuanhong 黎元洪 (1864-1928), and his prime minister, Duan Qirui 段祺瑞 (1865-1936), to have himself appointed interim prime minister in place of the latter. Jiang then rallied the loyalist general Zhang Xun 張勳 (1854-1923), who attempted to restore Puyi 溥儀 (1906-1967) to the throne, but soon betrayed him for Duan Qirui. When Duan regained control of the capital on July 14, 1917, he removed Jiang from his post as commander of the Beijing Gendarmerie. After the defeat of the Anhui Clique (wanxi 皖系) in 1920, Jiang organized an Anhui Support Association (wanshi cunjinhui 皖事促進會) in Beijing with little effect. In 1932, Wu Peifu 吳佩孚 (1874-1939) invited Jiang to be the vice-president of the New Religious Association for the Salvation of the World (jiushi xinjiaohui 救世新教會), which he chaired. Under the guise of anti-Japanese activism, Wu sought to remobilize the forces of the Zhili Clique (zhixi 直系), but his plan was abruptly halted by Jiang Jieshi.
In the aftermath of the Japanese occupation of Beijing in late July 1937, Jiang Chaozong regained a prominent position by having himself appointed head of the Peace Maintenance Committee (zhi’an weichihui 治安維持會) and then as mayor of the former capital between December 15, 1937, and January 15, 1938. However, he was quickly relegated to a secondary position after the establishment of the Provisional Government (linshi zhengfu 臨時政府) on December 14, 1937, within which he obtained only an honorary title as a member of the government committee (zhengfu weiyuan 政府委員). Furious at being sidelined, Jiang abolished all commercial taxes in the city on the eve of his departure from the mayoral post. Wang Kemin complained to the Japanese authorities and had the previous legislation restored. Subsequently, Jiang was appointed as a military advisor by the deputy chief of staff of the North China Area Army, Kawabe Masakazu 河辺正三 (1886-1965). Jiang also participated in the establishment of a Commission for Economic Strategy in North China (huabei jingji duice xieyihui 華北經濟對策協議會), of which he became the vice-president. After the replacement of the Provisional Government by the North China Political Affairs Council (Huabei zhengwu weiyuanhui 華北政務委員會) in March 1940, Jiang retained an honorary position. He died of illness on October 1, 1943, although some sources date his death to late 1945.